Les 40 ans d’Ondinnok: un florilège de festivités automnales!
Le 40ème anniversaire d’Ondinnok s’est poursuivi cet automne avec un florilège de festivités: le lancement du livre Ondinnok, de Catherine Joncas et Yves Sioui Durand, l’exposition Yawenda’ au Quartier des spectacles, ainsi que le colloque au Musée McCord Stewart – autant d’occasions de célébrer la compagnie maintenant quarantenaire, qui est ainsi entrée dans sa pleine maturité! Ces trois moments illustrent autant des occasions de célébration que de rencontres où se poursuit, inlassablement et de façon toujours aussi créative, l’aventure d’Ondinnok sur la scène culturelle et artistique d’ici.
Un livre...
Le jeudi 4 septembre était lancé le livre Ondinnok, écrit conjointement par Catherine Joncas et Yves Sioui Durand, et illustré par l’artiste Kaia’tanó:ron Dumoulin Bush, à la librairie Un livre à soi, sur la rue Laurier à Montréal. Le lancement de cet ouvrage magistral de plus de 500 pages, qui fait le tour par l’intérieur de l’expérience des deux cofondateurs de la compagnie, a attiré un très nombreux public, venu saluer les deux auteurs et les écouter lire des extraits du livre. Ce fut un moment exceptionnel, où une partie du contenu de ce livre, qui comprend de très beaux dessins de Kaia’tanó:ron, a été livré devant des futurs lecteurs, accompagné par le guitariste Vincent Beaulne. Ce livre, résultat de cinq années de travail de la part de Catherine et Yves, contient un témoignage absolument remarquable de l’aventure d’Ondinnok, dans sa genèse et sa transformation au cours des années. Le livre, publié aux éditions du passage, nous fait entrer dans les détails biographiques et artistiques inédits, et constitue une somme colossale de réflexions de l’aventure de la compagnie, telle qu’elle a été vécue par ces deux membres fondateurs. Le livre constitue donc un apport inestimable à la compréhension du projet théâtral, artistique, et culturel de la compagnie Ondinnok depuis ses plus grandes profondeurs et ses ancrages les plus intimes, et pointe vers les horizons les plus significatifs du théâtre autochtone contemporain. Toute personne intéressée par le théâtre, la création artistique autochtone, ou le mouvement culturel d’ensemble d’affirmation autochtone auquel se rattache Ondinnok, trouvera dans ce livre une mine d’informations capables d’éclairer le sens de cette aventure. Ce livre devient en effet un incontournable dans l’assise de la compagnie sur les plans historique et culturel; en lui, Ondinnok trouve non seulement ses racines, mais tout autant les ramifications sur lesquelles s’appuie le théâtre autochtone actuel, ainsi que les fruits que ces deux créateurs que sont Yves et Catherine apportent aux générations futures.
Le livre constitue un apport inestimable à la compréhension du projet théâtral, artistique, et culturel de la compagnie Ondinnok.
Une exposition…
L’exposition Yawenda’, au Quartier des spectacles de Montréal, a de son côté été inaugurée le 11 septembre, en compagnie de Dave Jenniss, et des personnes associées à l’organisation de cette exposition, dont le désigner graphique Maxime Jenniss. Cette exposition déambulatoire, qui présente 40 ans de théâtre autochtone francophone au Québec, a été soutenue par le Partenariat du Quartier des spectacles, et s’est tenue sur la place des artistes. Les sept vitrines composant l’ensemble de l’exposition, consacrées à Ondinnok, ainsi qu’aux compagnies Menuentakuan de Charles Bender, Marco Collin et Xavier Huard, Onishka d’Émilie Monnet, et Production AUEN de Soleil Launière, a mis en évidence le travail remarquable des artistes autochtones impliqués sur la scène théâtrale, par des photos et des textes retraçant ce parcours impressionnant des 40 dernières années. La compagnie Ondinnok, pionnière dans ce contexte, comptait quatre vitrines complètes soulignant sa contribution exceptionnelle au développement du théâtre autochtone francophone. Le discours d’inauguration de l’exposition par Dave Jenniss a constitué un moment fort, avec un témoignage personnel émouvant quant à la place du théâtre autochtone au Québec aujourd’hui, le rôle crucial d’Ondinnok dans ce contexte, et la manière par laquelle la direction artistique assumée par Dave depuis 2017 a pu marquer de manière déterminante son propre parcours.
Lors de la réception d’inauguration de l’exposition à l’Office national du film du Canada (ONF), les participants ont pu également voir des costumes issus de divers spectacles d’Ondinnok exposés dans le hall. L’exposition Yawenda’, en plus de présenter des magnifiques vitrines de la création théâtrale autochtone, prenait place de manière profondément symbolique à l’endroit même où, en mai 1985, le tout premier spectacle d’Ondinnok, Le porteur des peines du monde, avait été présenté, en plein air dans le cadre du premier Festival de théâtre des Amériques, dans ce qui n’était pas encore connu comme le Quartier des spectacles – comme si cette pièce avait été en quelque sorte un des déclencheurs de ce mouvement culturel d’ensemble pour le centre-ville de Montréal, où la présence autochtone doit se voir reconnaître la place qu’elle occupe dans notre culture et au sein de notre société.
Comme si cette pièce avait été en quelque sorte un des déclencheurs de ce mouvement culturel d’ensemble pour le centre-ville de Montréal, où la présence autochtone doit se voir reconnaître la place qu’elle occupe au sein de notre société.
Crédit photo: Partenariat du Quartier des spectacles, Martine Doyon
Et un colloque…
Enfin, le colloque «Ondinnok à 40 ans: le wampum de la continuité», présenté au Musée McCord Stewart les 22, 23 et 24 octobre, a poursuivi dans un contexte académique la réflexion sur l’expérience théâtrale d’Ondinnok. Ainsi, des universitaires en provenance du Québec, du Canada, des États-Unis et de France ont pu exposer leurs analyses de cette contribution majeure d’Ondinnok à l’expression théâtrale autochtone. En se penchant sur les significations multiples et complexes que comporte l’expérience théâtrale d’Ondinnok, le colloque a permis de faire ressortir de nombreux enjeux, autant esthétiques que politiques, artistiques ou sociaux, qui traversent la création théâtrale contemporaine, et la manière par laquelle elle traduit sur scène les positions culturelles défendues par les cultures autochtones du continent américain. En effet, Ondinnok reste une compagnie tout à fait à part dans le domaine de la création théâtrale autochtone, puisqu’elle est parvenue, dans le répertoire des pièces accumulées au fil des années, à mettre en scène des situations issues des quatre coins des Amériques, de Manawan à la Gaspésie, du Guatemala ou de Tenochtitlan à l’Alaska, et de la Terre de Feu à Montréal. Ce répertoire unique et fort impressionnant permet à Ondinnok d’apparaître comme une compagnie de théâtre capable de prendre à son compte l’expérience historique des cultures autochtones, depuis leurs origines précolombiennes jusqu’à aujourd’hui. Aucune autre compagnie théâtrale, autochtone ou non-autochtone, ne s’est jamais approchée d’une telle réalisation. Pour les personnes qui n’auraient pas assisté au colloque, une publication reprenant les communications présentées à cette occasion est prévue en 2026. C’est en quelque sorte en fonction d’un hommage du milieu académique à l’endroit du théâtre d’Ondinnok que ce colloque, et la publication qui suivra, peuvent être perçus: ils contribuent à l’approfondissement des résonances que suscite Ondinnok non seulement au théâtre, mais bien au-delà de la scène, dans les domaines sociaux, politiques, culturels et scientifiques que ces résonances atteignent.
Ondinnok reste une compagnie tout à fait à part dans le domaine de la création théâtrale autochtone, puisqu’elle est parvenue à mettre en scène des situations issues des quatre coins des Amériques.
Jean-François Côté interagissant avec le public pendant le colloque
Ondinnok: la suite
L’exploration théâtrale d’Ondinnok se poursuit tout aussi bien présentement, avec la préparation de la pièce Tupqan, nos territoires intérieurs, qui après avoir été présentée au Centre national des arts à Ottawa en novembre, prendra l’affiche chez Duceppe, à la Place des arts de Montréal, en mars 2026. Cette pièce, écrite par Dave Jenniss et Xavier Huard et mise en scène par Soleil Launière, est issue de la collaboration avec les compagnies Menuentakuan et Production AUEN. C’est le prochain rendez-vous sur scène avec Ondinnok!
Ondinnok a maintenant atteint sa pleine maturité, et poursuit ses explorations théâtrales avec, bientôt, une nouvelle direction artistique. Certaines des activités de cet automne, soulignant le quarantième anniversaire de la compagnie, montrent tout aussi bien que le dynamisme remarquable de la compagnie, depuis ses tout débuts, présentement et dans l’avenir prochain, est toujours inscrit dans le cadre d’un renouvellement constant de l’expérimentation théâtrale autochtone actuelle. L’âge de la maturité signifie ici une expérience qui se renouvelle au gré des avancées qu’elle propose au public, tout en tablant sur un ancrage fort au sein de la dramaturgie autochtone d’ici. Longue vie à Ondinnok!
Jean-François Côté
Jean-François Côté est professeur titulaire au Département de sociologie de l’UQAM. Il a entre autres publié, en collaboration avec Yves Sioui Durand, Catherine Joncas et Julie Burelle, "Xajoj Tun. Le Rabinal Achi d’Ondinnok. Réflexion, entretiens, analyses" (Québec, PUL, 2021).