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Équipe, Notre espace, Théâtre autochtone

Une retraite d’équipe pour s’ancrer dans notre nouveau local

Pour accueillir la venue du solstice d’hiver, ceux que nous aimons appeler affectueusement nos «vieilles pierres», Yves Sioui Durand et Catherine Joncas, nous ont concocté une journée bien remplie, dont l’objectif était de s’ancrer dans notre nouvelle maison, dans le Centre industriel Rosemont, que nous habitons depuis le mois d’octobre. Les retraites d’équipe sont aussi une occasion spéciale de nous retrouver tou·te·s ensemble et de nous reconnecter avec la raison d’être de notre travail.

La journée a débuté avec une cérémonie où nous avons brûlé du tabac pour exprimer notre gratitude envers ce lieu de création qui s’est offert à nous. Lors de notre dernière retraite, autour de l’équinoxe du printemps, nous nous étions invité·e·s dans cet espace, qui appartenait au Théâtre Parenthèse. Maintenant, nous en avons fait notre «chez nous». Après plusieurs années d’errance, nous pouvons enfin nous enraciner dans un lieu bien à nous, qui nous ressemble. Les yeux rivés sur la fumée qui s’élevait au plafond dans l’éclat d’un rayon de soleil, nous avons pris le temps de nous connecter à l’invisible, aux ancêtres qui étaient là avant nous et qui continuent de nous habiter. 

Après s’être réchauffé le corps – les muscles, les articulations, les os et la voix, nous avons fait un voyage dans nos imaginaires respectifs avec une médiation multisensorielle. Étendus sur le dos, nous avons laissé libre cours à nos rêves éveillés sur un fond de musique autochtone, alors que nos guides nous recouvraient de branches de sapin et de cèdre, encore froides et qui sentaient la forêt. Une pierre a aussi été déposée sur chacun.e de nous. Nous avons ensuite partagé nos visions dans un cercle de parole. 

Pour nous ouvrir l’appétit, Yves et Catherine nous ont préparé un festin de la forêt. Au centre du cercle, des bourgeons de pin, des grains de poivre d’aulne et des graines de myrique baumier étaient disposés sur des pierres. Tour à tour, appelé·e·s par le chant d’Yves, nous avons fermé les yeux pour déguster une de ces nourritures médicinales (sans savoir ce qu’elles étaient). Les autres membres de l’équipe, positionné.e.s aux quatre points cardinaux, agitaient avec bienveillance des roseaux séchés aux oreilles du goûteur ou de la goûteuse. Ensuite, nous sommes passé·e·s à table. Chacun·e avait amené un plat à partager pour le dîner. Nous avons également eu droit à un petit bol de bouillon d’outarde, symbole des grands festins qu’Ondinnok organisait en décembre dans son ancien local.

Les activités suivant la pause ont servi à bâtir notre maison. Sept branches provenant d’arbres différents étaient plantées contre un rideau noir. Décorées, pour les honorer et ainsi les remercier de nous avoir laissé les retirer de leur habitat naturel, elles avaient fière allure. Ces branches représentaient le rôle de chacun de nous dans l’équipe, et comment chaque personne est importante pour bâtir une structure solide. Inspiré.e par un rituel divinatoire propre à la méthode de création d’Ondinnok, chacun·e de nous s’est laissé choisir par la branche qui l’appelait et s’est familiarisé avec sa force et son énergie. Ensuite, nous avons marché en cercle, branches en main comme des guerrier·ère·s, mais aussi comme les peuples nomades qui parcouraient le territoire jusqu’à trouver un endroit propice à s’arrêter pour s’y installer.

C’est avec ces branches que nous avons construit notre tipi. Le sol était recouvert de branches de sapin et de cèdre sur lesquelles étaient déposés des pierres, des os (dont un crâne de castor) et des paniers d’écorce contenant des médecines et des trésors. Au centre du tipi brûlait de la sauge. Tour à tour, nous sommes allé·e·s à l’intérieur du tipi pour explorer toute cette beauté (minwashin) en marchant sur les branches qui craquaient sous nos pieds. Puis, nous avons ouvert le panier qui nous appelait. Nous avions le choix d’en révéler aux autres le contenu ou de garder le secret. Certains de ces paniers contenaient des artefacts datant de 3000 ans avant Jésus Christ, pour nous rappeler que c’est toute cette histoire que la compagnie porte à travers sa mission. 

Enfin, nous avons terminé la journée en nous tenant la main dans un dernier cercle, puis en célébrant ensemble autour d’un souper festif. Grâce à cette retraite, notre nouveau local est purifié et prêt à accueillir nos nouveaux projets ainsi que les artistes autochtones et allochtones qui en feront partie. Désormais, quand nous franchissons la porte de notre maison, on y respire une odeur de bois et de fumée qui nous rappelle cette journée pleine d’expériences transformatrices et de silences révélateurs. Car c’est en freinant le rythme insensé du quotidien qu’on retrouve le sens dans notre travail, et qu’on se réaligne avec le sens naturel du vent et du courant qui nous mène là où on doit aller.

Nathalie Delorme

Nathalie Delorme

Nathalie Delorme est la directrice générale des Productions Ondinnok

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